Projet de réforme du CGCT : initiative locale déposée

Le projet de réforme du CGCT, dans sa version applicable en Polynésie française, arrive au terme de la première étape, soit celle de l’initiative locale consistant à présenter aux différents acteurs des propositions de modification émanant du monde communal polynésien.

I) RAPPEL HISTORIQUE :

I.1) Des difficultés communales recensées :

Le SPCPF a recensé au cours de ces dernières années des demandes de « changements » dans le code général des collectivités territoriales (CGCT), suites à plusieurs difficultés liées :

A la lecture du code : celle-ci est ardue en raison des renvois d’articles à d’autres dispositions, en raison des conditions d’extensions ou d’adaptation sommaires des dispositions nationales ;

A l’application concrète de ses dispositions : le droit n’est parfois pas adapté à certaines situations locales.

Le dernier travail collaboratif sur ce sujet avait rassemblé des élus et agents communaux en 2015-2016 pour déboucher sur plusieurs modifications adoptées par la loi n°2016-1658 du 5 décembre 2016. Depuis, force est de constaté que, suite aux ajustements nécessaires soulevés autant par un contexte d’évolutions nationales que locales (évolution de notre statut en Polynésie française, loi engagement et proximité, …), les modifications touchant le CGCT applicable en Polynésie française ont à chaque fois été laborieuses.

 I.2) Une accéssibilité relative :

Ce constat s’ajoute à celui plus ancien d’une accessibilité très relative pour tout usager polynésien.

Afin de garantir la sécurité juridique et de faciliter l’accès au droit, la Direction générale des Outre-mer s’attache désormais à étendre les dispositions nationales sous forme de « compteurs LIFOU » (soit des tableaux détaillant la référence des textes pour préciser la rédaction applicable à chaque article).

Même si cette rédaction permet de sécuriser l’application des dispositions, elle entraîne néanmoins des renvois à des textes qui ne peuvent être lisibles pour tout citoyen lambda si le code n’est pas consolidé.

Le haut-commissariat est chargé de la consolidation du CGCT applicable en Polynésie française. Néanmoins, le travail de consolidation reste laborieux et la récurrence des modifications du code ne permet pas d’avoir une version rapidement à jour.

I.3) Confirmation du besoin, déjà communiqué aux partenaires métropolitains :

Depuis la dernière loi modifiant notamment spécifiquement le CGCT applicable en Polynésie française en 2016 (loi 2016-1658 du 5 décembre 2016), les nombreux constats de problématiques ponctuelles ou récurrentes ont été soulevés à plusieurs reprises, auprès des membres des ministères et services concernés.

En novembre 2018, la rencontre avec notamment le sous-directeur général de la DGOM a permis d’évoquer ces difficultés et d’avoir un accord de principe sur une modification du code « à droit constant », avec la proposition d’une aide technique qui n’a malheureusement jamais vu le jour.

En août 2019, le Ministre en charge des collectivités territoriales, Mr Sébastien LECORNU, s’était proposé à lors du congrès des communes à Rikitea. Le Haut-commissaire proposait dans les jours suivants au SPCPF de commencer un travail de toilettage en recueillant les propositions des communes pouvant être intégrées dans le projet de loi « engagement et proximité » (courrier 516/DIRAJ/BAJC/mn du 20.08.2019).

En novembre de la même année, le Président du SPCPF et le Maire et également Ministre de l’agriculture Tearii ALPHA ont présenté la nécessité d’avoir un code propre aux communes polynésiennes. Un accord de principe avait été proposé par le cabinet du Ministre de l’Outre-Mer, Mme Annick GIRARDIN.

A l’issue de toutes ces rencontres, il fut proposé que le SPCPF pilote le projet de réforme en lien avec les différents partenaires institutionnels de la Polynésie française.

En février 2020 se tenait une première réunion organisée par le SPCPF pour définir la méthodologie de travail. Le monde communal avait répondu présent et l’Etat, ainsi que des professeurs d’université, s’étaient positionnés en soutien technique.

Néanmoins, l’épidémie de COVID-19 a obligé le SPCPF à mettre le projet de côté durant l’année 2020, le temps du traitement des urgences notamment sanitaires par tous les partenaires.

Repris en février 2021, le projet de réforme du CGCT s’est poursuivi au travers plusieurs étapes en alliant les services de l’Etat, les services du Pays et le monde communal.

 

II) LE PROJET :

II.1) La démarche du SPCPF:

Pour recueillir et formaliser les attentes du monde communal, le SPCPF a choisi de constituer une équipe technique d’agents publics.

En particulier, le département « Promotion de l’institution communale » du SPCPF a pu compter sur l’investissement des communes, établissements et institution suivants, qui ont mis à disposition leur agents sur l’analyse du CGCT et les propositions de modification :

  • L’Assemblée de Polynésie Française, avec Emilia MANIN, juriste Chargée des travaux législatifs au service des Service des travaux législatifs
  • Le Centre de Gestion et de Formation, avec Jérôme CHARBONNIER, directeur adjoint du statut
  • La communauté de communes de Hava’i, avec Teva GUILLAIN, directeur général des services
  • La commune des Gambier, avec Firmin PAEAMARA, secrétaire général
  • La commune de Moorea-Maiao, avec Heimata NORESMAT, juriste. D’autres collaborateurs de la commune ont également participé aux travaux dédiés aux dispositions funéraires : que mesdames Cécile FARCY, soient aussi remerciées.
  • La commune de Papeete, avec Sarah TANG, juriste
  • La commune de Punaauia, avec Tanguy POULIN, juriste
  • La commune de Pirae, avec Timeri LAU, juriste
  • La commune de Rimatara, avec Manfred MAHAA, secrétaire général

 

 

Le SPCPF et cette équipe ont pu travailler au cours des étapes suivantes :

DATE

ETAPE

SITUATION

Février 2021

Début du projet et constitution d’une équipe projet constituée d’agents communaux, intercommunaux et d’une juriste de l’APF, avec l’appui technique de la DIRAJ

Réalisé

Mars - avril 2021

Etape 1 d’état des lieux : définition des attentes précises du monde communal via :

  • Une consultation générale
  • Une analyse technique du CGCT dans sa version applicable en PF par l’équipe projet

Réalisé

Mai 2021 – février 2022

Etape 2 de formalisation des attentes sous forme de propositions

Réalisé

Mars – mai 2022

Etape 3 de consultation du monde communal sur les propositions de modification

Réalisé

 Juin-2022-novembre 2022

Etape 4 de rédaction par le SPCPF des propositions de modifications du CGCT partie législative et réglementaire

Réalisé

Novembre 2022

Etape 5 de transmission des propositions aux partenaires

En cours

En tout, ce sont 30 réunions et groupes de travail ont été organisées et ont regroupé jusqu’à 41 communes, 5 groupements de communes et 1 établissement public administratif au terme de deux années, entrecoupées par la gestion de la pandémie du COVID19.

II.2) Etape 1 : état des lieux et analyse technique :

L’état des lieux fut l’étape qui a permis de définir la vision du monde communal sur l’évolution des règles relatives à l’administration, à l’organisation et aux compétences des communes, de leurs groupements et de leurs établissements publics.

Le bloc communal et les services de l’Etat ont ainsi été consultés pendant près de 2 mois sur leurs attentes.

Malgré des réticences liées à la technicité ou encore à une inaccessibilité du code général des collectivités territoriales applicable en Polynésie française (CGCT), les nouvelles équipes municipales ont majoritairement souhaité une réforme du CGCT avec un titre « Polynésie française » plus adapté aux réalités locales, en justifiant ce choix sur la base de deux constats.

Le premier est technique : un certain nombre de dispositions présentes dans le CGCT n’ont pas à être modifiées. D’autres dispositions nécessitent au contraire des modifications de fond ou de forme (ex : communes associées ; compétences environnementales ; …).

Le second constat est lié au partenariat institutionnel :  le statut de la Polynésie française positionne les communes polynésiennes en tant que collectivités territoriales à part entière, aux spécificités dépassant des seuls critères démographiques ou géographiques. Un travail collaboratif d’adaptation de dispositions existantes doit nécessairement être réalisé en parallèle du projet de réforme, dans le respect des compétences dévolues au Pays et à l’Etat, afin d’apporter des réponses complètes aux problématiques « de terrain » vécues par les communes et relevées lors de cet état des lieux.

II.3) Etapes 2,3 et 4 sur la formalisation et la consultation :

Sur la base de ces diverses attentes et de l’analyse de plus de 1500 articles, près de 120 propositions de modifications ont été élaborées par l’équipe technique (61 propositions de fond dont 47 propositions générales + 13 propositions relatives au statut des communes associées et plus de 60 propositions de formes).

Seules les propositions de fond ont été soumises à la consultation du bloc communal et ont été classées en cinq thématiques prioritaires :

  • Les finances et le budget ;
  • L'environnement ;
  • Les pouvoirs de police du maire ;
  • Les dispositions funéraires ;
  • Le statut des communes associées polynésiennes.

En tout, 114 participants représentant 41 communes, 3 groupements de communes et 1 établissement public administratif ont participé à la consultation qui s’est déroulée de mars à avril 2022, soit pendant 2 mois.

 

 

III) LES PROPOSITIONS "DE FOND" RETENUES (ETAPE 5)

III.1) Résultats de la consultation de mars/avril 2022 :

III.1.1) Tendance générale

A l’issue de la consultation, les propositions de fond ont fait l’objet de rédactions selon les précisions ou souhaits majoritaires apportés par les participants.

Deux objectifs majeurs de modification peuvent être dégagés de l’ensemble de ces propositions :

  • Favoriser l’autonomie des collectivités locales ;
  • Favoriser l’adaptabilité du cadre règlementaire aux spécificités communales polynésiennes, en prenant en compte leurs réalités.

Ce sont en tout 42 propositions de fond qui sont désormais soumises aux partenaires. Vous pourrez les retrouver ici : https://spc.pf/evolution-cgct

Les propositions suivantes des consultations n’ont toutefois pas été traitées dans le cadre des propositions de rédaction en raison :

  • De leur vote négatif global ;
  • De leur adaptation déjà actée en parallèle au projet ;
  • De leur traitement uniquement local, à effectuer avec les institutions polynésiennes.

 

SUJET

PROPOSITION DE MODIFICATION

REFERENCE DANS LE CGCT

COMMENTAIRE

Aménagement urbain

Intégrer les servitudes privées dans le domaine public communal

Art. L. 1841-2

Etendu par l’article 246 de la loi « 3DS »

Destination des cendres

Création de dispositions locales relatives à la destination des cendres

Article L 2213-18-1

Dispositions à traiter en Polynésie française

Profil du directeur d’une régie

Améliorer la rédaction du profil du directeur d’une régie

Article R 2221-75

avis du TAPF confirmant cette possibilité – proposition de modification « technique » rédactionnelle 

Pouvoir de police

Préciser qu’en l’absence de réglementations spécifiques portant sur les domaines liés aux services publics environnementaux et de défense extérieure contre l’incendie, il appartient au Maire, au titre de ses pouvoirs de police générale, de définir les règles propres à l’exécution de ces services

/

Vote négatif

Eau potable

Favorable pour participer à la protection de la ressource en eau destinée à l’alimentation des communes par la protection des aires d’alimentation des captages d’eau potable

/

Politique de l’eau de la Polynésie française CAP 2030

Favorable au droit de préemption pour les aires de captage d’eau pour les communes, concernant les terrains situés sur des aires de captage d’alimentation en eau potable afin que les communes puissent assurer la préservation de la ressource en eau

Périmètre des communes associées

Ouvrir la possibilité de former des recours contre les consultations de la population à tous les résidents et pas uniquement à ceux qui ont participé à la consultation

/

Vote négatif

Les tableaux de propositions « de forme » recensent des adaptations rédactionnelles dans la version consolidée du CGCT par les services du haut-commissariat et des propositions plus techniques dans les parties législatives et règlementaires du code. 

Vous pourrez également les retrouver ici : https://spc.pf/evolution-cgct

 

III.1.2) Les présentations aux partenaires

Ces différentes propositions ont tout d’abord été présentées au haut-commissaire de la république en Polynésie française le jeudi 10 novembre 2022.

Une délégation du SPCPF composée de son Président, Cyril TETUANUI, de sa vice-présidente en charge de la formation, Namoeata BERNARDINO et de 3 agents du SPCPF s’est ensuite déplacée du 21 au 25 novembre dernier à Paris, pour les présenter également aux autres partenaires situés dans l’hexagone, soit le Ministère des Outre-mer et les parlementaires polynésiens.

Le projet est désormais dans les mains des acteurs concernés et le SPCPF attends leurs retours et surtout le « vecteur législatif » qui permettra de modifier le CGCT dans sa version applicable à la Polynésie française.

En parallèle, le département Promotion poursuit les travaux localement dans les autres domaines qui relèvent, pour parties, des compétences de la Polynésie française (règlementation en matière d’hygiène et de salubrité sur l’assainissement non collectif, pour les cimetières, etc) et qui nécessitent aussi des ajustements « locaux », comme relevés pendant les précédentes consultation